Chimère
Chimère
A Adrienne S.
Sphinx cruel et charmeur qui dardes tes yeux verts
Sur cette âme en détresse et sur ce coeur qui ploie,
Au sablier du temps, verse, furtive joie,
Le mensonge et l'oubli des mirages divers.
Tends, sur la mer lointaine où fleurissent des voiles,
Tout un azur léger où s'estompe la mort;
Au sillage des ans accroche l'ancre d'or,
Mets pour tous un poème au front pur des étoiles.
Va, masque la douleur où s'épuisent nos jeux,
D'un coin de ciel revêt le désir qui se brise,
Glisse un rayon furtif dans les plus humbles yeux.
Et si, quelque âpre soir, ton secret agonise,
Si la Vie a vaincu terrassant la beauté,
Songe que c'est par toi qu'elle aura palpité.
Le chemin solitaire, 1908