Blanche Sahuqué

Ironie

Ironie

 

Pour nous masquer la vie et la douleur promise

                     A nos espoirs,

Rions au jour qui vient, buvons l'heure qui grise,

                     Sans voir le soir.

 

Regardons sans effroi l'avenir qui s'endeuille

                     De nos désirs,

Et goûtons le plaisir comme un fruit que l'on cueille,

                     Sans le finir.

 

Durcissons notre coeur et notre front qui rêve

                      A l'âpre loi;

Et si notre oeil se trouble en voyant la vie brêve

                      De nos émois,

 

Egrenons sur nos pleurs notre rire en fusée

                      Et nos dédains,

Bafouant l'Idéal que nos jeunes années

                      Croyait certain.

 

Et sans l'amour qui trompe et le rêve qui leurre,

                      Indifférents,

Narguons la mort certaine et le péril de l'heure

                      En nous jouant.

 

Le chemin solitaire, 1908.



22/09/2012
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